Moana Gascogne, saison 2 : À vos marques, prêts, …

La seconde campagne estivale sur les starting-blocks

Dans le cadre de l’émission des Super-Pouvoirs de l’Océan organisée par France Télévisions et France Nature Environnement, le Groupe de Recherche sur les Cétacés, association membre nationale de FNE, mène le projet Moana Gascogne conçu sur deux ans entre mi-2024 et mi-2026.

Ce projet vise à apporter de nouvelles connaissances sur les modes de vie des cétacés du Golfe de Gascogne, notamment du point de vue du comportement des petits cétacés et des cétacés dits « grands plongeurs », impactés par des pressions anthropiques croissantes.

L’émission avait été diffusée par France 2 le 28 novembre 2023, et nous avions pu compter sur le soutien de nombreux donateurs… merci à vous !


Quel premier bilan pour la campagne 2024 ?

La première phase de terrain a donc eu lieu en juillet-août 2024, avec une campagne estivale à bord d’Anacaona, un voilier de 12 mètres équipé pour la prospection cétologique. Le protocole de terrain rigoureux suivi a permis un travail en effort de prospection visuelle, acoustique, ou combinée.

Notre logiciel de bord, le SMAC, en fonction de suivi acoustique

Durant les 40 jours d’embarquement de la saison estivale 2024, les conditions météorologiques ont été globalement médiocres mais ont permis la navigation sur 24 journées, dont 23 avec un effort de prospection, totalisant ainsi 1474 kilomètres de prospection en effort sur plus de 180 heures, majoritairement dans la partie Sud du Golfe de Gascogne. Le Gouf de Capbreton, relief remarquable de cette région mais pourtant dépourvu de statut de protection en France, a ainsi été particulièrement échantillonné.

Même pendant les journées propres à la navigation, les journées à détectabilité bonne ou excellente n’ont pas été légion…

Les 23 journées de prospection ont permis la réalisation de 614 points d’écoute acoustique sous-marine dont 255 avec présence relevée de cétacés, appartenant à huit espèces.
Ces journées de prospection ont également donné lieu à 85 observations visuelles sur 8 espèces de cétacés, majoritairement des Dauphins communs (Delphinus delphis, 40 observations), des Dauphins bleus et blancs (Stenella coeruleoalba, 19 observations) et des Ziphius de Cuvier (Ziphius cavirostris, 15 observations, confirmant par ailleurs l’intérêt remarquable du site pour l’espèce).

Parmi ces observations visuelles, 27 ont été des observations « longues » à visée d’étude comportementale.
Lors de ces observations en particulier, un accent était mis sur leur documentation par plusieurs moyens complémentaires (application PADOC et photographies pour le comportement de surface, acoustique pour le comportement sous-marin, drone permettant d’avoir une vision plus globale du comportement des animaux et de la structure de leur groupe) afin de maximiser les possibilités d’études fines du comportement des cétacés.

Lorsque les conditions sont propices, un drone léger offre des perspectives intéressantes, mais il faut prendre bien garde à ne pas risquer de déranger les animaux

Le travail de bureau (bancarisation et inventoriage, étude et exploitation des fichiers de route, d’observation, d’acoustique, de vidéos) a commencé à l’automne 2024 et se poursuit en 2025.
Il vise notamment à mieux comprendre les « budgets-temps » et les activités des animaux au quotidien, et in fine à voir comment cela pourrait se traduire en termes de sensibilité des animaux aux activités humaines, particulièrement en relation avec les menaces constituées par les captures accidentelles dans les engins de pêche et les nuisances sonores d’origine anthropique.

Les observations longues dans le Sud du Golfe ont permis d’en apprendre davantage sur le comportement des cétacés de la zone

Les premiers résultats sont spécialement intéressants à propos des différences observées entre les deux espèces de petits delphinidés majoritaires dans le Golfe de Gascogne, le Dauphin commun et le Dauphin bleu et blanc, tant du point de vue de leurs répartitions, de leurs tailles de groupes (49 individus par groupe en moyenne pour les Stenella pour presque deux fois moins pour les Dauphins communs (25 ind./groupe)) que de leurs comportements et activités, particulièrement lorsqu’ils sont associés en groupes mixtes dans lesquels les Delphinus ont tendance, de jour, à se reposer en sous-groupes étalés tandis que les Dauphins bleus et blancs évoluent en périphérie en sous-groupes serrés avec comportements à dominantes sociale et alimentaire… Coïncidence ou pas, leurs comportements vis-à-vis des bateaux sont également différents.

Ce Dauphin bleu et blanc leucique est un habitué du Gouf où, comme ses congénères normalement pigmentés, il n’aime guère être approché

Le nombre important d’observations de Ziphiidés a en outre permis d’en apprendre davantage sur leur comportement lors de leurs phases de récupération entre sondes profondes, et a au passage permis de confirmer la région Sud Gascogne comme une des zones les plus peuplées en Ziphius de Cuvier et autres Ziphiidés, au niveau mondial. (..À quand un statut de protection dédié pour cette zone franco-espagnole d’intérêt majeur pour cette famille de cétacés ?)

Le comportement social des Ziphius de Cuvier est loin d’être inexistant mais demeure très peu connu

L’ensemble des données et résultats acquis est en tout cas prometteur malgré des conditions de terrain adverses durant ce premier été de prospection.


Et pour les semaines à venir ?

L’embarquement pour la campagne estivale 2025 débutera la semaine prochaine.
Dépendant des conditions environnementales, nous pourrons choisir d’aller vers le Nord ou le Sud, quoique la partie Nord ait notre préférence afin d’équilibrer un petit peu notre effort d’échantillonnage dans le Golfe. ..Qu’en sera-t-il finalement ?

…Rendez-vous d’ici quelques jours !

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